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« Mes livres […] sont chansons nullement PROSE » écrit Céline en 1949. « Considérez ce que je médite ! Marre de prose ! chansons partout ! » s’écrie-t-il encore dans Féerie pour une autre fois, avant de se présenter, dans un entretien accordé quelques années avant sa mort, comme « le dernier musicien du roman », plaçant ainsi son œuvre tout entière sous le signe du chant.
Menée pour la première fois sur l’ensemble des écrits – théâtre et pamphlets compris –, l’étude de cet aspect essentiel de la poétique de Céline est riche d’enseignements sur les rapports complexes de son écriture avec le folklore et le politique, parfois contradictoires, toujours passionnants. Elle met également l’accent sur l’une de ses caractéristiques les plus sous-estimées, son travail de mémorialiste et de chroniqueur, qui fait de Céline, au même titre que Saint-Simon, Château-briand et Proust, un des grands écrivains du Temps de la littérature française. Elle ouvre, enfin, à une interrogation fondamentale sur l’acte d’écrire lui-même. Qu’advient-il en effet d’une littérature qui se laisse ainsi transpercer par de multiples éclats de voix et de mélodies sous-jacentes, qui abandonne si ostensiblement les prestiges séculaires de la référence écrite pour laisser la parole à des genres habituellement mineurs ou méprisés, qui se déprend de tout ce qui l’a, depuis l’origine, imposée comme objet de culture et d’admiration ? On le voit, sous des dehors badins ou volontiers anodins – chansonnettes, petits airs, fredaines – la question est d’importance : elle porte sur l’essence même de la littérature, sur ce qui la définit en son histoire propre et lui donne sa place dans notre culture.